Dans les années 1980, de nombreux débris d’avions de la Seconde Guerre mondiale, furent découverts entre 64 et 87 mètres de profondeur au sud de Marseille. C’est au terme d’un recoupement de plusieurs indices dont la découverte exceptionnelle d’une gourmette au nom d’Antoine de Saint-Exupéry par un pêcheur marseillais, que ces vestiges furent identifiés dans les années 2000 comme étant ceux de l'avion Lockheed Lightning P-38/F-5B à bord duquel disparut le commandant Antoine de Saint-Exupéry, le 31 juillet 1944.
L’épave du P-38 de Saint-Exupéry se trouve sur la face nord-est de l’île de Riou. Elle avait déjà été explorée dans les années 80 par Luc Vanrell qui ne se doutaient pas alors qu’il s’agissait des vestiges de l’avion de l’écrivain.
C’est la découverte en 1998 d’une gourmette au nom de l’écrivain, prise dans les filets du pêcheur marseillais Jean-Claude Bianco entre la calanque d’En Vau et l’île Maïre, qui relance les recherches dans ce secteur. Lors des différentes plongées, les restes d’un empennage de P-38 Lightning en mauvais état ont été identifiés, ainsi qu’une jambe d’atterrissage gauche et une partie de poutre équipée de son turbocompresseur.
Les vestiges, largement dispersés et endommagés par de nombreux chalutages, sont déclarés au Drassm en 2000 par Luc Vanrell, en même temps que ceux d’un Messerschmitt allemand.
C’est grâce aux caractéristiques techniques de l’épave, étudiées par Luc Vanrell et Philippe Castellano, et au terme d’une enquête minutieuse que la découverte de l’avion de Saint-Exupéry est ainsi officialisée en 2003. Les recherches au sein des services d’archives de l’unité II/33 dont dépendait Antoine de Saint-Exupéry, ainsi que dans celles de l’USAAF et des services allemands, ont permis de montrer que parmi les épaves de P-38 recensées sur le secteur, seuls quatre appareils de ce type (dans la version « J » du modèle) se sont abîmés en Méditerranée le long de nos côtes durant la Seconde Guerre mondiale. Parmi eux, un seul n’a pu être identifié. Il a été reconnu, par déduction, comme étant celui de Saint-Exupéry.
En 2003, sous l’égide de l’association Aéro-Re.L.I.C, le Drassm autorise la remontée par la société Comex des vestiges, qui représentent environ 1/10e de l’avion. L’expertise réalisée par Philippe Castellano a permis de révéler sur le caisson du turbocompresseur, fixé sur un morceau de la poutre gauche, le numéro d’identification 2734 du constructeur Lockheed. Dans les tableaux de l’Army Air Force, ce numéro correspond à celui du Lightning F-5B matricule militaire 42-68223, confirmant définitivement qu’il s’agit bien de l’avion d’Antoine de Saint-Exupéry.
Le P-38 Lightning est un chasseur-bombardier américain de la Seconde Guerre mondiale. Mis en service en 1941, il est puissamment armé et a la particularité d’être le premier appareil de chasse bimoteur et bipoutre américain. Ses queues jumelées lui donnent un aspect différent des autres avions de chasse, le rendant facilement reconnaissable.
Plusieurs versions de cet appareil ont été fabriquées tout au long de la Seconde Guerre mondiale. L’avion de Saint-Exupéry était un type dérivé du P-38 J, le F-5B, un appareil de reconnaissance photographique non armé.
Le travail de conception du P-38 Lightning commença au début de l'année 1937. L’USAAC (US Army Air Corps) recherchait un intercepteur bimoteur à long rayon d’action et adressa un cahier des charges à différents constructeurs comme Boeing, North American, Belle et Grumman. C’est la firme Lockheed qui remporta l’appel d’offre. Le P-38, conçu par Hall Hibbard et Clarence Johnson, est équipé de moteurs très puissants V12 Allison V-1710 disposés sur le double fuselage, d’un train de roulement tricycle et d’une verrière bulles s’ouvrant par le haut.
L’appellation P-38 désigne uniquement les avions de chasse, le P étant l’initiale de Pursuit. Ils sont armés de quatre mitrailleuses et d’un canon de 20 mm dans le nez. Si cet avion était équipé d’une excellente puissance de feu, les versions utilisées pour la reconnaissance aérienne étaient caractérisées par leurs niches de cameras vitrées à très grandes focales en remplacement de l’armement positionné dans le nez. Ce modèle fut l'appareil de reconnaissance photographique le plus largement utilisé durant la Seconde Guerre mondiale, avec près de 1 400 modèles convertis depuis des P-38E, F, G, H, J, et L, et désignés en service F-4 (quatre appareils de prise de vues dans le nez) ou F-5, le F étant l’abréviation de Foto.
La reconnaissance photographique prit son essor au cours de la Seconde Guerre mondiale. Elle était très importante pour les Alliés car elle permettait notamment de connaître la localisation de l'ennemi, des positions de radars, de ses déplacements (marins, routiers, ferroviaires) ainsi que l’efficacité des bombardements.
En septembre 1939, suite à l’agression de la Pologne, l’Angleterre puis la France déclarent la guerre à l’Allemagne. Devenu pilote au cours de son service militaire, Antoine de Saint-Exupéry parvient à se faire affecter à une escadrille de reconnaissance aérienne malgré son âge et une santé fragile. Après l’Armistice de juin 1940, il est démobilisé et rejoint les États-Unis où il espère convaincre les Américains de sortir de leur neutralité.
Deux ans plus tard et suite à l’entrée en guerre des États-Unis, il rentre en France pour aller combattre l’Allemagne nazie. À 44 ans, il a largement dépassé la limite d’âge mais obtient une dérogation et intègre les Forces françaises libres au sud de la Méditerranée pour réaliser de nouvelles missions de reconnaissance.
Le 31 juillet 1944, il s’envole de sa base de Borgo-Poretta, en Corse, pour une mission au-dessus de la France. L’objectif est d’effectuer une série de reconnaissances photographiques en vue d’un débarquement américain en Provence. Une fois les côtes dépassées, l’écrivain ne donna plus signe de vie et fut porté disparu. Il est déclaré mort pour la France en 1948.
L'état de l'épave et la simulation informatique de l’accident indiquent que l’avion de Saint-Exupéry toucha la mer à très grande vitesse et presque à la verticale. Aucun élément ne permet cependant de fournir d’explication sur les circonstances de cet accident. L’enquête sur le mystère de la disparition d’Antoine de Saint-Exupéry est marquée par plusieurs témoignages et fausses pistes, certains évoquant même l’hypothèse d’un suicide de l’aviateur.
Avec l’aide de Lino van Gartzen, fondateur d'une association de recherches d'avions perdus pendant la guerre, Luc Vanrell interroge des vétérans du Jgr. 200, groupe de combat qui officiait en Provence en 1944. Leur enquête les mène en 2008 à Horst Rippert, ancien pilote de chasse de la Luftwaffe, qui révèle avoir vu un Lightning P-38 au large de Marseille et lui avoir tiré dessus avant qu’il ne s’écrase en mer. Lecteur et admirateur de l’écrivain qui a suscité sa vocation de pilote, il déclare «si j’avais su qui était assis dans l’avion, je n’aurais pas tiré. Pas sur cet homme ». Aucune archive n’ayant permis de vérifier ce témoignage, le doute subsiste encore aujourd’hui.
Musée de l’Air et de l’Espace du Bourget - Aéroport de Paris - Le Bourget 3, esplanade de l’Air et de l’Espace CS 90005 - 93352 Le Bourget Cedex.
Tél. : 01 49 92 70 00 (renseignements) ; 01 49 92 70 62 (accueil du musée)
Gisant au même endroit que le P-38 d’Antoine de Saint-Exupéry, se trouve l’épave d’un autre avion, un Messerschmitt Bf 109 allemand. Le pilote, identifié grâce au moteur de l’avion, était un jeune prince allemand, Alexis Prinz zu Bentheim und Steinfurt, abattu le 2 décembre 1943 par la chasse américaine. Luc Vanrell fait le rapprochement entre cette découverte et celle d’ossements exhumés en 1964 sur l’île de Riou. Le laboratoire de police scientifique de Marseille confirmera cette identification grâce à de l’ADN mitochondrial retrouvé dans une vertèbre et comparé à celui du frère du pilote. C’est grâce à cette enquête, menée parallèlement à celle de la disparition de Saint-Exupéry, que Luc Vanrell put entrer en contact avec des vétérans du Jgr. 200 et avec Horst Rippert.
Antoine de Saint-Exupéry fait partie des pionniers de la compagnie mythique de l’Aéropostale, aux côtés des célèbres aviateurs Jean Mermoz ou Henri Guillaumet. C’est à cette époque qu’il se lance dans la rédaction de son premier roman. En parallèle à sa carrière d’aviateur, il mène en effet une carrière d’écrivain reconnu. Il raconte notamment ses expériences dans plusieurs ouvrages comme Courrier Sud, Vol de nuit ou encore Terre des hommes. En 1943, il publie Le Petit Prince, son plus célèbre ouvrage qui connut un succès mondial.
Pays | France |
Aire marine protégée | Parc national des Calanques |
Département | Bouches-du-Rhône |
Commune | Marseille |
Lieu-dit | Nord-est de Riou |
Code EA | 30-221 |
Nature du site | Épave d'aéronef |
Chronologie | Période contemporaine |
Indicateur de période | Structure, archives |
Structures | Fuselage d'avion |
Mobilier |
Amphores :
Céramiques : Autre : |
Lieu d'exposition | Musée de l’Air et de l’Espace du Bourget |
Contexte |
Géologie : Sable coquiller
Situation : immergé Profondeur : - 17 à 85 m |
Historique des recherches |
Déclaration : 2000 - Luc Vanrell
Expertise: 2000 - Luc Long (DRASSM) Opérations: |
Commentaires | |
Rédacteur | Elyssa Jerray, en collaboration avec Philippe Castellano et Luc Vanrell |